BIP

LOINTAIN OUEST de Franck Caillet

Une vague gigantesque percute la jetée. Dans le petit port, des chalutiers affichent leurs couleurs vives. Un pêcheur, barbe grise, ciré jaune et casquette bleue délavée, tire sur sa pipe éteinte, le regard clair tendu vers l’horizon marin. Le soleil coule dans l’infinité océane embrasant la nature d’une lumière aux teintes improbables.
Dans sa communication au colloque Si la photo est bonne1, Raphaële Bertho évoque la construction d’un imaginaire du territoire véhiculé par la carte postale. Elle cite Jean-François Chevrier à propos de cette industrie culturelle : “Cette photographie rassure et compense la misère quotidienne, elle enjolive pour séduire. Elle ne dit rien, ou toujours la même chose, elle nourrit obsessionnellement l’imaginaire qu’elle a créé” 2.
S’agirait-il alors seulement, paré d’une honnêteté à l’ambition scientifique, de documenter les mutations constantes d’un territoire? De nouveaux stéréotypes apparaissent innervant en premier la pratique des photographes.
L’intention est claire. Nourri de photographies américaines et parce que ces espaces sont aussi les miens, que mon quotidien ne se déroule pas dans des paysages sanctuarisés, je pose un regard sous influence sur la terre bretonne.
Alors, un dialogue s’installe, sorte d’enquête identitaire, entre mon origine liée à ce territoire et une “identité” photographique.
Dans ce jeu de bascule d’un stéréotype à l’autre, une vision critique se dégage. Entre uniformisation et appropriation kitch, l’homme projette ses désirs sur un décor.

1 - Raphaële Bertho, “L’injonction paysagère”, Commentaire au colloque Si la photo est bonne, INHA, 20-21 octobre 2011 et http://www.culturevisuelle.org/territoire/211, 3 novembre 2011. 2 - Jean-Francois Chevrier, « Qu’est-ce qu’un paysage? », Art Press n° 91, avril 1985, p. 27.

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